Centrafrique : des élections sous la menace rebelle

Les scrutins présidentiel et législatif se sont ouverts sous haute tension, les rebelles ayant promis de menacer l’intégrité du vote dans un pays largement désorganisé par des années de guerre civile.

Par J.Cl. Le 27 décembre 2020 à 11h57- leparisien
La Cour constitutionnelle de Centrafrique ayant refusé de reporter les élections, la présidentielle et les législatives se déroulent ce dimanche sous très haute tension.

Les bureaux de vote ont ouvert à 7h30 pour permettre aux Centrafricains de désigner leur nouveau chef d’Etat et leurs 140 députés alors qu’une grande partie du pays, en guerre civile depuis 2013, est sous la menace d’une offensive rebelle, renforcée depuis l’été par des combattants venus du Soudan.

Samedi, au moins six candidats opposés au président sortant Faustin-Archange Touadéra, favori du scrutin, avaient déposé d’ultimes recours, arguant notamment du retrait récent de Jean-Serge Bokassa et de l’insécurité sur la majeure partie du territoire. Car les groupes armés, qui contrôlaient déjà deux tiers du territoire, ont juré il y a neuf jours de « marcher sur Bangui » pour empêcher le scrutin.

Grâce au renfort de centaines de paramilitaires russes, soldats rwandais et Casques bleus de la force de maintien de la paix de la Mission de l’ONU en Centrafrique (Minusca), ils se tiennent pour le moment à distance de la capitale centrafricaine, seul endroit où, de fait, la double élection semble pouvoir se dérouler.

Casques bleus et soldats centrafricains patrouillent


Mercredi, la France a aussi fait survoler le pays par ses avions de chasse : Emmanuel Macron entendait « marquer la condamnation par la France des tentatives de déstabilisation », selon la formule de l’Elysée.

Ce dimanche, Bangui est calme, sous le contrôle de nombreux Casques bleus et soldats centrafricains et rwandais patrouillant dans tous les quartiers. Des blindés blancs de la Minusca, armés, ont été placés devant les lieux de vote. De nombreux bureaux ont ouvert avec retard, le matériel n’étant pas arrivé à temps, selon des journalistes de l’AFP sur place. D’autres ont attendu après des tirs sporadiques entendus pendant la nuit, a déclaré un témoin à Reuters.

Des coups de feu importants ont été signalés tôt dimanche dans la ville de Bouar, à environ 435 km au nord-ouest de la capitale.


« C’est très important pour moi d’être là en tant que citoyenne. Je pense que ce vote va changer notre pays, quel que soit le président », s’enthousiasme Hortense Reine, une enseignante. « Je veux que les élections soient terminées, quel que soit le vainqueur, afin que nous puissions retourner à nos vies », a, au contraire affirmé Israël Malongou, un entrepreneur de la capitale Bangui, qui depuis trois jours garde ses enfants confinés par sécurité.

« Je suis calfeutré chez moi »


La crise a épuisé beaucoup des 4,8 millions d’habitants dans ce pays pauvre, en dépit de sa richesse en or et en diamants. Depuis l’indépendance de la colonie française, en 1960, le pays a connu cinq coups d’État et de nombreuses rébellions. Depuis 2013, les combats ont fait des milliers de morts et poussé plus d’un million de personnes, soit près d’un quart du pays, à quitter leur foyer.

« Tout le monde est en train de fuir en ce moment, je suis calfeutré chez moi », témoignait samedi soir Robert, de Boali, à 80 km au nord de Bangui. « Comment voter quand nous n’avons même pas nos cartes d’électeurs ? », se lamentait-il au téléphone, la voix entrecoupée par des détonations pas si lointaines.

Depuis 2018, grâce aux efforts acharnés du président Touadéra, soutenu par la communauté internationale, la guerre avait pourtant considérablement baissé d’intensité, et visé beaucoup moins les civils.

leparisien

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