« J’ai été mariée de force à l’âge de 12 ans », l’enfance volée de Fatimetou

« J’ai été mariée de force à l’âge de 12 ans », l’enfance volée de Fatimetou. Comment fait-on pour mener de front ses études et gérer un foyer avec trois enfants lorsqu’on est encore une adolescente ?
UNICEF Mauritanie

Comment fait-on pour mener de front ses études et gérer un foyer avec trois enfants lorsqu’on est encore une adolescente ?

Cette réalité, c’est celle à laquelle fait face Fatimetou* depuis près de trois ans. Des bancs de l’école au statut de mère et d’épouse, elle nous livre son histoire.

« Je l’ai appris une semaine avant le mariage. Il était plus âgé que moi, peut-être 40 ans. J’étais sous le choc, J’ai protesté, j’ai clairement dit que je ne voulais pas me marier. Mais comme mon père s’était déjà engagé, il devait honorer sa parole. Lorsqu’est arrivée la nuit de noce, j’ai dit à mon époux que j’étais encore une enfant et je l’ai supplié de faire doucement.

Ce qu’il s’est passé ensuite ? Je préfère ne pas en parler. »

Malgré la législation en place, le mariage des enfants est un fléau qui persiste en Mauritanie. Dans un pays ou l’honneur d’une jeune fille repose principalement sur la garantie de sa virginité jusqu’au mariage, les parents évoquent souvent la protection de leur enfant pour justifier cette décision. Comme Fatimetou, près d’une adolescente sur trois entre 15 et 19 ans* serait actuellement mariée en Mauritanie.

« Je me suis mariée très jeune, à l’âge de 12 ans. Je ne comprenais rien, je ne pensais pas du tout au mariage. Tout ce qui m’intéressait c’était d’aller à l’école. Il était clair que je ne voulais pas me marier. Pour quoi faire ? Mais on ne m’a pas laissé le choix. Mes parents m’ont dit que c’était pour mon bien, pour me protéger des garçons.

Après ça je suis rapidement tombée enceinte de jumeaux. Mon mari étant très pauvre, nous avions à peine de quoi subsister. A la naissance de notre troisième enfant, les deux premiers souffraient déjà de malnutrition et pour ne rien arranger mon mari est tombé malade et a dû être hospitalisé à Nouakchott. Epuisée et à bout de forces, j’ai dû me résoudre à accepter l’aide de ma mère. »

Le mariage des enfants est une violation des Droits de l’enfant. Il compromet le développement des filles, favorise la déscolarisation et engendre généralement des grossesses précoces. S’il est vrai que la Mauritanie a réalisé des progrès importants ces dernières années notamment en fixant l’âge légal du mariage à 18 ans, les autorités peinent à faire appliquer cette législation en raison de normes sociales encore profondément ancrées, particulièrement en milieu rural.

« Dans ma petite boutique derrière la maison, il n’y a que des cartons vides et quelques paquets de cigarettes, à peine assez pour nourrir ma famille. C’est ma mère qui s’occupe du commerce et des enfants pendant que je vais l’école. Je suis en première année de collège. Là-bas tout le monde connait ma situation mais personne ne dit rien. C’est un fardeau lourd à porter, mais je suis déterminée à aller à l’université pour devenir sage-femme.

Jamais je n’accepterai que ça se reproduise avec ma fille. Je m’y opposerai. J’ai subi tellement de choses douloureuses depuis mon enfance : j’ai été excisée et mariée de force alors que je n’étais encore qu’une petite fille. Ils ont volé mon enfance. Mais grâce à Dieu je suis là à présent pour le bien-être de ma famille et de mes enfants. »

Grâce au soutien financier de BMZ, UNICEF et ses partenaires identifient les jeunes filles en situation précaire, victimes de violences, de mutilations génitales, de mariage ou de grossesses précoces. Ensemble, avec l’aide d’un relai communautaire et d’une assistante sociale, ils identifient les besoins des bénéficiaires et leurs propose un appui matériel ou financier et un suivi psychosocial adapté à leur situation.

*Le prénom a été changé

Source: Multiple Indicator Cluster Survey (MICS) 2015”. The MICS was carried out in 2015 by the National Statistical Office, as part of the global MICS programme with a technical assistance provided by UNICEF.

Source: UNICEF

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