Mauritanie, l’année des deux dames- Entre les lignes


L’AS-TU LU,LULU? par Nous on l’a lu, le 12 février 2021

Un passionnant voyage dans le temps et dans le désert mauritanien.

Jeudi 11 février 2021, Le Monde publiait un article sur une nouvelle ruée vers l’or à Chami en Mauritanie. Trois mille orpailleurs tentent leur chance pour gagner un maximum d’argent en un minimum de temps, au prix e leur santé et d’un désastre environnemental en plein désert.

On parle peu de la Mauritanie, pays fort discret connu pour ses mines de phosphate et pour son implication dans le problème géopolitique du Sahara Occidental occupé par le Maroc, un voisin belliqueux dont on se méfie. Le regain de tension entre les Sahraouis et l’armée marocaine a eu lieu récemment à la frontière avec la Mauritanie qui observe discrètement l’évolution de la situation.

Il est cependant possible de découvrir ce pays méconnu en lisant « L’année des deux dame », journal de bord de deux amies, deux journalistes qui ont eu la curiosité de revivre l’étonnant périple de deux dames des années trente, fuyant le conformisme patriarcal de la société française : Odette de Puigaudeau et Marion Sénones. En textes et dessins, ces aventurières ont décrit leur traversée du désert à dos de chameaux, dans des conditions évidemment pénibles vu les conditions de vie très dures. Surpris, les Maures ont gardé le souvenir de cette traversée et l’ont appelée « l’année des deux dames.

Presqu’un siècle après, nos deux journalistes dialoguent avec les écrits des deux dames et entre elles. Quatre voix s’entremêlent et nous racontent la vie des populations rencontrées, l’évolution des modes de transport et de communication: du chameau à la jeep, du courrier postal à Facebook… Et les attentes des jeunes qui aspirent à la modernité prônée par les publicités et les réseaux sociaux dans un pays qui a du mal à leur offrir un avenir prospère.

Nous voyageons avec elles, nous avons chaud pendant la journée dans le désert et froid la nuit sous la tente. Nous savourons les plats locaux et le thé très fort. La beauté des étoiles, la violence de l’orage, le plaisir des conversations calmes dans le désert, le choc culturel en séjournant dans les villes.

Et puis, l’on découvre qu’Odette n’était pas qu’une exploratrice farfelue : elle a joué un rôle d’agent de renseignement pour l’Etat français, s’est disputée avec les autorités mauritaniennes dont elle n’appréciait pas la politique et s’est repliée au Maroc avec son amour, Marion. Elles y sont mortes toute les deux, oubliées de tous. Leur héritage : des livres, des lettres, des dessins, des photographies, des kilos d’échantillons de pierres, des objets en tous genre, et un mystère sur leur objectif exact.

Les autrices n’ont pas poursuivi cette enquête, ce n’était pas l’objet du livre qui vise à redécouvrir la Mauritanie et sa population Maure. Il nous manque donc la description des autres peuples mauritaniens, et certains aspects de la vie sociale comme la persistance de l’esclavage dénoncée pourtant par de courageux démocrates de ce pays. Il ne s’agissait pas d’un reportage mais d’un récit de voyage. Deux dames sur les traces de deux dames et c’est très agréable à lire. (G.L.)

Catherine Faye et Marine Sanclemente. L’Année des deux dames. Ed. Paulsen. Paris 2020.
entreleslignes.be

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